La tête de l’Eglise catholique est à la fois immuable et changeante
Depuis son élection à la tête de l’Eglise catholique, le pape François intrigue les commentateurs, qui ne savent où le classer. Appelant à l’amour des déshérités, est-il un progressiste ? Prônant la morale traditionnelle, est-il un conservateur ? Attirant chaque semaine, place Saint-Pierre, une foule estimée à 100 000 personnes au moins, il est en tout cas un pape populaire, évoquant, par sa simplicité, le « bon pape Jean » (Jean XXIII). Comme ce dernier, François sera-t-il l’homme d’une réforme aux accents de révolution ? Il est trop tôt pour le dire, et ceux qui le prévoient, pour s’en réjouir ou pour le déplorer, interprètent les faits en laissant à chaque fois la moitié de la vérité de côté. Comme ses prédécesseurs, l’actuel pape, en dépit de son style particulier, n’entre pas dans une catégorie toute faite, d’une part parce qu’il exprime une pensée qui n’obéit pas à des schémas préétablis, d’autre part parce que la papauté déploie son action sur un terrain situé à la charnière du temporel et du spirituel.
Institution bimillénaire, sans équivalent dans l’histoire et dans le monde, le gouvernement de l’Eglise romaine est tout à la fois immuable et changeant. Tel est le constat qui s’impose à l’esprit quand on lit le Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège qui vient de paraître dans la collection Bouquins. C’est pour nous initier à cette double réalité que Christophe Dickès, un spécialiste d’histoire des relations internationales, a réuni une équipe de 46 auteurs, tous issus d’une nouvelle génération d’historiens vaticanistes, afin de présenter, en 500 notices, les instances dirigeantes du catholicisme. Centré sur la période moderne et contemporaine, l’ouvrage traite, comme son titre l’indique, du Vatican, Etat de 44 hectares dont les frontières ont été fixées en 1929 par les accords du Latran, comme du Saint-Siège, organisation qui préside aux destinées d’une religion rassemblant aujourd’hui 1,2 milliard de fidèles. Souverains pontifes, personnages et rouages de la curie, courants d’idées, enjeux économiques et financiers, vie quotidienne, tout est là. « Le Vatican, combien de divisions ? » ironisait Staline. Staline est mort, le pape est plus vivant que jamais.
Jean Sévillia
Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège, sous la direction de Christophe Dickès, Robert Laffont, « Bouquins », 1 120 p., 30 €.