La France Orange mécanique : tel est le titre d’un livre qui fait beaucoup parler de lui en ce moment (*). Son intitulé fait référence à Orange mécanique, film d’anticipation que Stanley Kubrick tira du roman d’Anthony Burgess, en 1971, et qui décrivait le déchaînement de violence d’une bande de délinquants, à Londres, habitués à voler, violer et tuer pour le plaisir. En France, aujourd’hui, affirme le journaliste Laurent Obertone, le scénario Orange mécanique ne relève pas de la fiction, mais de la réalité : d’après son enquête, 13 000 vols, 2000 agressions et 200 viols sont commis chaque jour dans notre pays.
Il ne faut pas s’étonner, dès lors, que, selon un récent sondage, seulement 22 % des Français affirment qu’« on peut faire confiance à la plupart des gens », ni que 87 % de nos concitoyens soient en attente d’ordre et d’autorité. Le Monde, qui publie ces résultats (25 janvier 2013), déplore les « crispations alarmantes de la société française ». Mais à qui la faute ? Face à l’insécurité, face à la réalité des menaces quotidiennes, la peur, au moins dans les grandes villes, est devenue un sentiment courant.
A contrario peut-on souligner ce qu’ont ressenti les 800 000 ou un million de manifestants du 13 janvier 2013. Dans un monde violent, une impression de paix. Dans une époque de défiance vis-à-vis de l’inconnu, une réaction de confiance à l’égard du voisin jamais vu. Au sein d’une foule immense, une sensation de totale sécurité. Or il est notoire que le fond de la manifestation avait été fourni par le réseau des paroisses et des diocèses, dont la capacité de mobilisation a surpris amis et adversaires, ou en tout cas par les représentants d’une France habituellement invisible, mais pour qui le christianisme reste une référence. Il ne s’agit pas de faire de l’angélisme : les catholiques, pris individuellement, ne sont pas des petits saints. Mais il est permis de rappeler que le christianisme civilise, que cela a toujours été une de ses caractéristiques et que, dans un temps barbare, cela redevient un de ses atouts.
Jean Sévillia
*) La France Orange mécanique, de Laurent Obertone, éditions Ring.
