Un soldat d’autrefois

Un album pour faire mémoire du général de Castelnau, qui perdit trois fils pendant la Grande Guerre. Clemenceau, qui le surnommait le Capucin botté, n’aimait pas ce militaire trop catholique.

     Le 20 août 1914, un officier se présente devant le commandant de la IIe Armée, le général Edouard de Castelnau, et d’une voix inquiète, lui annonce cette nouvelle : « Mon général, le sous-lieutenant Xavier de Castelnau a été tué ce matin d’une balle dans le front. » Selon les témoins, Castelnau, qui était en train de dicter ses ordres, eut une secousse, resta un instant silencieux puis, se tournant vers son état-major, enchaîna : « Continuons messieurs. » Ainsi le grand chef apprit-il la mort d’un de ses fils. Il en avait sept, dont six étaient partis en même temps que lui pour la guerre : en 1914 et en 1915, deux autres seront tués au champ d’honneur.
Historien militaire, Patrick de Gmeline collectionne les documents sur le général de Castelnau, auquel l’attache un lien familial. Le centenaire de 1914 lui fournit l’occasion de faire paraître cet album où 600 illustrations font revivre la figure d’un soldat d’autrefois.
     Né en 1851 au sein d’une famille noble remontant aux croisades, Edouard de Curières de Castelnau choisit la carrière des armes afin de servir la France sans servir la République : comme tous les siens, il est catholique et légitimiste. Promu général en 1906, il devient chef d’état-major de Joffre en 1911. En août et septembre 1914, il remporte la bataille du Grand-Couronné et y gagne le surnom de « sauveur de Nancy ». Par la suite, il alterne le commandement de groupes d’armées et le service auprès de Joffre.
     Stratège prudent, économe du sang des hommes, il sera un des piliers de la victoire de 1918. Castelnau n’aura pourtant pas son bâton de maréchal, à la fin de la guerre, notamment parce que les anticléricaux au pouvoir ne tenaient pas à récompenser celui que Clemenceau traitait de « capucin botté ». Elu député dans la Chambre bleu horizon, en 1919, président de la Fédération nationale catholique fondée, en 1924, pour contrer l’anticléricalisme du Cartel des gauches, ce conservateur resté hostile à Vichy s’éteindra, nonagénaire, en 1944. A Coëtquidan, en 2012, a eu lieu le baptême de la promotion Général et sous-lieutenant de Castelnau. Saint-Cyr, lieu de mémoire, honorait ainsi à la fois la grandeur d’un père et le sacrifice d’un fils.

Jean Sévillia

Le Général de Castelnau (1851-1944), de Patrick de Gmeline, éditions Charles Hérissey, 246 p., 600 illustrations, 45 €.

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