Plaidoyer pour la nation

Pourquoi se dissoudre dans l’universel ?

     L’élection d’Alain Finkielkraut à l’Académie française, l’autre semaine, aura été un joli pied de nez à tous ceux pour qui la nation est une figure obsolète et qui cherchent à coller des étiquettes infamantes sur ceux qui affirment le contraire. Non que Finkielkraut soit un nationaliste à tout crin, mais son amour de la langue française, son combat contre l’abandon de la culture classique, sa prise en compte d’un héritage collectif qui s’appelle l’identité nationale et même son aveu selon lequel certains Français, à travers leur histoire familiale, bénéficient de cet héritage depuis plus longtemps que d’autres (ces fameux «Français de souche» dont la simple évocation fait scandale), tout cela illustre une notion affirmée de la nation française chez un écrivain dont les racines personnelles plongent pourtant ailleurs et qui ne fait pas mystère, d’autre part, de son attachement à Israël.

     L’essai que publie aujourd’hui Jean-Louis Harouel recoupe largement (mais pas totalement) ces perspectives qui n’ont pas effrayé «la vieille dame du Quai Conti». Agrégé de droit, professeur à Paris-II, l’auteur est non seulement juriste, mais historien des idées. Ses livres Culture et contre-cultures (PUF, 2002) et Le Vrai Génie du christianisme (Jean-Cyrille Godefroy, 2012) ont analysé en profondeur les impasses intellectuelles de l’époque. Avec ce nouvel ouvrage, Harouel confirme sa capacité à éclairer les esprits par des synthèses pouvant éventuellement être discutées, mais toujours étayées et nourries aux meilleures sources.

     L’universitaire plaide ici pour la nation en commençant par critiquer ce qu’il appelle «la tyrannie post-chrétienne de l’universel», pensée qui confond le refus de l’indifférenciation avec «la haine de l’autre». Il dresse en exemple les petits États (Israël, Suisse), fondés sur un fort particularisme, trait qui garantit leur aptitude à se défendre. Harouel, ensuite, met en garde contre les communautarismes qui dissolvent le lien national. Invitant l’État à se recentrer sur la nation, il lance enfin une charge contre les institutions européennes dans leur forme actuelle. On pourra, à bon droit, juger ce livre un peu abrupt. Mais on ne peut lui enlever ce mérite: donner à penser.

Jean Sévillia

Revenir à la nation, de Jean-Louis Harouel, Editions Jean-Cyrille Godefroy, 166 p., 15 ?.

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