A propos de l’identité

La parution simultanée, au mois de janvier, du livre de Laurent Dandrieu, Eglise et immigration, le grand malaise (Presses de la Renaissance) et de celui d’Erwan Le Morhedec (alias Koz sur les réseaux sociaux), Identitaire, le mauvais génie du christianisme (Cerf), a récemment déclenché, autour du concept d’ « identité », une vive controverse dans les milieux catholiques. Sans chercher à rapprocher artificiellement un antagonisme bien réel, non sur le plan humain (on a entendu et vu Dandrieu et Koz débattre courtoisement) mais sur le plan des idées, il faudrait rappeler quelques distinctions de bon sens qui laisseraient des portes ouvertes pour un dialogue entre des hommes unis par l’essentiel : la foi en Jésus-Christ. Etre chrétien n’est pas une identité : on entre dans l’Eglise par le baptême, qui est une grâce personnelle, non directement transmissible autrement que par métaphore. Communauté des baptisés rassemblant les enfants de Dieu de toutes races et de toutes nations, société véritablement universelle (catholique), l’Eglise n’efface pas les appartenances particulières de ses membres à des nations et civilisations qui peuvent avoir, à travers leur histoire et leur culture, un lien spécifique avec le christianisme – avec le catholicisme dans le cas de la France. On est généralement français par la naissance, ou par la naturalisation qui est une agrégation à une communauté préexistante, la nationalité se transmettant à sa descendance. Les deux ordres ne peuvent être confondus, ce qui ne signifie pas qu’ils s’excluent l’un l’autre. Ceux qui se disent et catholiques et identitaires feraient mieux de réfléchir aux ambigüités que ce dernier mot véhicule, pouvant conduire à une notion ethnique de la nation, étrangère tant à la pensée catholique qu’à la tradition politique française. Cela ne signifie pas qu’il n’existe pas une identité nationale française qui se décompose elle-même en de multiples identités puisant à des héritages divers. En notre époque de perte de repères, la redécouverte de cette identité peut être la voie d’une conversion spirituelle, tant l’histoire de France, avec ses héros et ses saints, est liée au catholicisme, et même si d’excellents Français ne sont pas chrétiens. Pour autant, être français n’est pas la garantie du salut éternel – cela se saurait ! – et être français (ou allemand ou américain ou chinois) n’est pas non plus une condition qui englobe toute l’identité personnelle d’un enfant de Dieu. Faisons les bonnes distinctions et employons les bons mots, et une partie de la fièvre retombera dans certaines discussions.

Jean Sévillia

 

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